Nature Canada

L’Équité raciale et la nature urbaine

MOBILISER LES JEUNES DE COULEUR DANS DES ACTIVITÉS DANS LA NATURE

Une évaluation des besoins communautaires réalisée pour le programme CommuNature de Nature Canada

par Jacqueline L. Scott & Ambika Tenneti

Introduction

Le rapport d’étude Équité raciale et nature urbaine de Nature Canada présente une évaluation des besoins des communautés racialisées fondée sur des faits probants, de même que des recommandations visant à mobiliser efficacement ces communautés dans les espaces naturels de nos villes et les programmes axés sur la nature de ces milieux urbains.

Cette étude a été parrainée au début de 2020 dans le but d’informer et de guider Nature Canada et nos partenaires dans l’intégration des principes de lutte contre le racisme et d’équité dans tous nos programmes. Une grande partie des travaux de terrain s’est déroulée alors qu’on assistait un peu partout dans le monde à des manifestations organisées en solidarité avec Black Lives Matter, ce mouvement américain créé en réaction à l’homicide par la police de George Floyd et de Breonna Taylor, et du profilage racial de Christian Cooper, un ornithologue noir, dans Central Park à New York.

Il est crucial que tous les groupes voués à la protection de la nature fassent la promotion de la lutte contre le racisme et de l’équité dans leurs programmes, et le document Équité raciale et nature urbaine propose des mesures pratiques et précises pour soutenir ce travail.

Group of kindergarten kids learning gardening outdoors

ÉTAT ACTUEL DES CONNAISSANCES

La population canadienne est de plus en plus multiculturelle et urbaine, à l’instar d’une tendance mondiale qui fait craindre que les populations ne s’éloignent toujours davantage de la nature, en particulier les jeunes et les communautés racialisés.

À Toronto, où a eu lieu l’étude, plus de la moitié des 6,2 millions de citadins sont racialisés. La région du Grand Toronto compte également la plus grande population de Noirs au Canada (350 000), dont 100 000 jeunes.

Les études passées qui ont examiné la faible participation des communautés ethniques aux activités sportives, récréatives et de loisirs par rapport aux populations blanches ont généralement attribué cet écart à des particularités socioéconomiques et culturelles. Certaines études ont néanmoins relevé d’autres obstacles, comme le manque d’information sur les installations et les activités, l’affichage inadéquat dans les espaces naturels, la barrière linguistique ainsi que la crainte de la criminalité, des préjugés raciaux ou des agressions.

Toutefois, une enquête nationale de Mountain Equipment Coop (MEC) réalisée en 2018 a constaté un taux de participation supérieur des populations de couleur aux activités récréatives extérieures comparativement aux populations blanches. Cette année, MEC a commencé à inclure plus de modèles diversifiés dans ses publicités.

Les recherches actuelles mettent l’accent sur les obstacles systémiques et recommandent la création d’espaces culturels plus diversifiés. Dans notre étude, nous posons la question suivante : que faire lorsque l’espace naturel est perçu comme étant réservé aux populations blanches? Et que faire lorsque la nature est perçue comme étant sauvage et extérieure au cadre urbain?

MÉTHODOLOGIE

« Apprenez à observer et à examiner la nature. C’est l’essence même de la conservation. Consacrez une heure chaque jour à noter ce que vous remarquez dans la nature. »

Les recherches menées pour cette étude ont englobé des groupes cibles, des entrevues, des études de cas vécus et une vaste consultation de la littérature. Les principales auteures et chercheuses sont : Jacqueline Scott, doctorante noire en éducation de la justice sociale, et Ambika Tenneti, doctorante originaire de l’Asie du Sud et scientifique spécialiste de l’environnement. Elles partagent toutes deux un grand amour de la nature et une vive passion pour la participation communautaire.

Interviews

Des leaders autochtones travaillant à des programmes éducatifs en environnement ont aussi été interviewés pendant une heure chacune. Ces entrevues ont exploré l’intégration des connaissances autochtones dans des programmes urbains et la possibilité de mettre à profit la nature urbaine pour jeter des ponts entre les communautés autochtones et immigrantes. Catherine Tàmmaro est une artiste multidisciplinaire wyandotte. Rebecca Beaulne-Stuebing est membre d’un projet autochtone du Land Stewardship Circle.

Groupes cibles

Les groupes cibles ont été recrutés par des organismes communautaires travaillant auprès de jeunes de couleur
et axés sur la justice sociale. Les rencontres avec les groupes cibles ont été au nombre de quatre, d’une durée d’une heure chacune. Ces groupes comptaient 10 participants âgés de 14 à 24 ans, de niveaux secondaire à universitaire, filles et garçons, musulmans et chrétiens. La plupart vivent en appartement.

Recommandations

La plupart des recommandations formulées dans Équité raciale et nature urbaine s’inscrivent dans l’un des trois thèmes suivants :

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Accroître la diversité raciale dans les communications;

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Promouvoir la nature urbaine et améliorer l’accès des jeunes racialisés;

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Accroître le sentiment de confort dans les espaces naturels au moyen d’activités guidées et d’éducation;

Teacher and kids school learning ecology gardening

ACCROÎTRE LA DIVERSITÉ RACIALE DANS LES COMMUNICATIONS

« Le peu de personnes de couleur dans les organismes, les fils des médias sociaux et les publications consacrées à la nature, renforce l’omniprésence blanche dans ce domaine. »

  • Présenter des jeunes et des spécialistes racialisés dans les documents de communications et les médias sociaux;
  • Mettre en relief des personnes racialisées occupant des fonctions centrées sur la nature et le secteur environnemental. De tels modèles peuvent influencer les jeunes dans leur choix de programmes d’études, de carrière, de bénévolat et d’activités de loisirs.

PROMOUVOIR LA NATURE URBAINE

« Les paysages urbains ne doivent pas être perçus comme étant moins dignes d’intérêt que les paysages sauvages. »

  • Augmenter le nombre de partenariats avec les organismes oeuvrant auprès des communautés urbaines racialisées;
  • Concevoir des programmes d’écologie urbaine intégrant une diversité de visions de ce qu’est la nature, ainsi que les principes autochtones de conservation;
  • Présenter la nature urbaine, notamment les parcs urbains et les jardins communautaires, comme étant aussi digne d’intérêt que les paysages sauvages;
  • Concevoir des programmes porte ouverte montrant le plaisir apporté par la nature et son caractère indissociable de la vie citadine. Ceux-ci peuvent inclure des films sur la nature, des marches guidées, la distribution de plantes et de graines de semence, des ateliers et des activités ludiques centrés sur la nature pour les enfants et les familles;
  • Jumeler les activités dans la nature à des barbecues, pique-nique et autres activités de partage pour resserrer les liens communautaires.
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Three Modern Muslim Young Women In Hijab Headscarf Walking In Park Outdoors. Cheerful Islamic Students Ladies Talking Enjoying Walk Outside. Female Frienship, Fashion Concept

ACCROÎTRE LE SENTIMENT DE CONFORT DANS LES ESPACES NATURELS AU MOYEN D’ACTIVITÉS GUIDÉES ET D’ÉDUCATION

« Pour les jeunes musulmans visibles, les craintes tournaient autour de leur tenue ou de leur hijab. Pour les jeunes Noirs, elles tournaient autour de la couleur de leur peau. »

  • Dissiper les craintes de commentaires racistes ou d’agressions physiques en augmentant la représentation de personnes diversifiées dans les médias et en engageant des personnes de couleur pour diriger des excursions;
  • Apaiser les craintes de dangers comme les tiques, les ratons-laveurs, l’herbe à puces par des marches guidées éducatives et par des publications;
  • Stimuler le sentiment de sécurité dans la nature par des marches, des randonnées et des excursions pédagogiques guidées par des personnes de couleur ou dirigées par des Autochtones;
  • Tenir compte du bénévolat dans les jardins communautaires dans le calcul des crédits d’éducation civique;
  • Tenir compte des préférences culturelles en matière d’espaces naturels et de propreté dans l’organisation
    des programmes.

LES AUTEURES

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Jacqueline Scott

Jacqueline L. Scott est étudiante au doctorat au Département d’éducation de la justice sociale de l’Université de Toronto. Alors qu’elle prenait une pause dans ses études, elle a agi en tant que consultante spécialisée en recherche communautaire. Jacqueline Scott oeuvre également
à titre de guide de randonnée pour deux clubs de plein air. La présente étude s’appuie sur le travail qu’elle effectue depuis plusieurs années dans le milieu des groupes de plein air. Ses travaux ont été largement diffusés, notamment par le média en ligne La Conversation, la plateforme Own Voice de CBC et la Greenbelt Foundation. Jacqueline Scott est également conférencière, animant notamment des webinaires pour divers établissements et organismes comme la bibliothèque du Bowdoin College, l’Université York et le Collectif des parcs canadiens pour l’innovation et le leadership. Elle a donné de nombreuses entrevues à la radio, à la télévision et dans la presse écrite sur l’expérience des Noirs dans les loisirs de plein air.

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Ambika Tenneti

Ambika Tenneti est candidate au doctorat en foresterie Daniels à l’Université de Toronto. Ses recherches portent sur l’engagement des nouveaux immigrants à participer à l’intendance des forêts urbaines. En Inde, elle a travaillé avec des organismes communautaires locaux
dans les régions rurales et éloignées et avec des agences de recherche nationales basées dans des grandes villes. Son expérience de travail avec les populations autochtones et forestières en Inde a transformé sa façon de voir les modes de vie durables et les mécanismes d’apprentissage. Depuis qu’elle s’est installée à Toronto, elle s’est portée volontaire auprès de nombreuses organisations publiques et à but non lucratif, notamment la Ville de Toronto et les organismes LEAF et 10,000 Trees, afin de renforcer l’engagement communautaire dans la gestion responsable des forêts urbaines. En tant qu’ambassadrice du projet Rivers Rising auprès de l’organisme de bienfaisance Toronto Green Community, elle a dirigé et coordonné des marches urbaines dans le but d’offrir une nouvelle perspective sur la diversité des quartiers de Toronto. Citoyenne canadienne depuis peu, Ambika Tenneti se passionne pour l’engagement des nouveaux arrivants au Canada dans les causes environnementales et la vie civique, et elle agit comme bénévole pour l’organisme d’aide à l’établissement CultureLink.

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